Paris
le 14 janvier 1841
Monsieur
J’ai reçu hier, avec beaucoup de plaisir, la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’ecrire le 9 de ce mois, <1> et dans laquelle vous m’apprenez les grands et nouveaux progrès que vous avez fait faire à la photographie Sur papier. je m’acquitterai avec empressement lundi prochain de la commission que vous me donnez pour l’académie, où cette annonce, soyez en bien sur, Sera accueillie avec beaucoup d’interêt Vous aurez rendu ainsi un grand service aux naturalistes et aux Voyageurs pour lesquels les plaques iodurées sont d’une manipulation difficile. je vois aussi que les artistes trouvent aux images tracées sur ces plaques un grand inconvenient provenant de leur miroitage inévitable … et ils ont paru plus contents, pour leur usage habituel des representations sur papier lorsqu’elles etaient aussi heureusement venues que quelques uns des dessins faits par vous et aussi par un mr Bayard <2> qui s’y est beaucoup exerce.
<Il est?> arrivé à obtenir des dessins, faits par la chambre obscure dont les artistes habiles m’ont paru très charmés. mais il tient son procede secret et comme il n’a aucune notion de chimie, je crains fort que sa routine seule le guide. je ne puis donc trop vous presser de faire connaitre le vôtre, en quoi mon age me rend peut etre un peu impatient; mais ce que vous m’en dites justifie bien ce désir car, outre le parti d’art que vous en tirez sa rapidité nous le rendra encore infiniment précieux pour les recherches physiques sur les proprietes des radiations. à cette occasion. je prends la liberte d’appeler votre attention sur un rapport que je viens de faire a l’academie lundi dernier avec Mrs Arago <3> et Savary <4> et qui va paraitre cette semaine dans notre compte rendu, que je Suppose vous parvenir. il s’agit d’un fait nouveau, et tres remarquable, qui est relatif aux <illegible deletion> effets des radiations de diverse nature. je ne vous en donne pas ici le détail que vous trouverez mieux exposé dans le rapport. mais en supposant que vous l’ayez Sous les yeux, voici une experience, que nous n’avons pas faite, et que l’extreme sensibilité de votre papier vous permettrait peut etre de realiser pour nous. ayez un verre rouge, de ces verres colorés, par le protoxide de cuivre qui ne laissent passer que des rayons rouges et un peu d’orangé. Il faut qu’il soit assez large pour recouvrir completter <sic> et deborder un peu <illegible deletion> le dessin que vous voulez obtenir; et il / que aussi que ce dessin puisse etre place au fond d’une boite de bois, a laquelle le verre rouge servira de couvercle. <illegible deletion> d’après ce que vous me dites, votre papier est placé au fond de votre chambre obscure, sans voir le jour; et Sans doute aussi vous avez eu devant l’objectif un volet opaque qui le voile, pour le decouvrir seulement en <illegible deletion> de l’objet. ceci convenu et l'objet etant en place ouvrez ce volet seulement pendant un instant, puis refermer aussitot, de sorte que le papier ne voye l’objet à travers la lentille que pendant tout au plus une seconde, et moins encore s’il vous est possible cela fait reporter le tout dans l’obscurité parfaite où vous vous eclairerez seulement par la lueur d’une bougie, que vous ferez meme bien de tenir un peu loin. puis ayant <illegible deletion> le papier où vous ne verrez probablement pas d’empreinte sensible, placez le au fond de la boite de bois, que vous couvrirez avec le verre rouge, en fermant soigneusement toutes les jointures, et tous les interstices latéraux avec plusieurs doubles de papier noir collés les uns sur les autres, de manière que tout accès soit interdit aux radiations vers le papier excepte à travers le Verre rouge. alors, ayant couvert celui cy d’un ecran opaque, porter la boite ainsi <illegible deletion> abritée sur quelque balcon, ou quelque plateforme, ou vous la poserez horizontalement de maniere que, l’ecran opaque etant oté, le papier puisse voir à travers le verre rouge, non pas des objets rayonnant définis, mais le ciel seul vers le zenith. La radiation transmise impressionnera Votre papier, seulement sur la portion de Sa surface qui a reçu l’empreinte instantanee et apres plusieurs heures, l’image deviendra visible, d’invisible qu’elle etait, sans que la presence de l’objet soit nécessaire; du moins en supposant que la substance qui lui donne sa sensibilité, soit comme il est probable, un bromure, un chlorure, ou un iodure d’argent. car le phenomene n’a ete jusqu’ici observe qu’avec ces trois corps. nous n’avons même pas encore tenté l’experience dans la chambre obscure, mais seulement par impression directe, ce qui est beaucoup plus facile. cest l’extreme Sensibilite de votre papier qui me fait croire quelle reussirait ainsi, en admettant qu’il fut dans les conditions mentionnees. car toutes les substances sensibles n’offrent pas ces proprietés d’impressionnement partiel. l’auteur de cette curieuse experience est le fils de notre confrere Mr Becquerel. <5> je Suis persuadé que si vous la lisez dans le rapport elle vous interessera; et il serait le bon <illegible deletion>, que nous dûssions à votre nouvelle découverte le moyen d’en etendre l’application.
Adieu monsieur. recevez de nouveau tous mes remerciemens. il n’y a rien a reprocher pour le passé à la poste anglaise ou francaise, mais a la fatigante impression d’un ouvrage qui est sur le point de paraitre, et qui m’a accablé <illegible deletion> j’avais fait, toutefois exactement toutes vos commissions pour l’academie, comme vous avez pu le voir dans les comptes rendus, et je Suis meme votre depositaire pour quelques dessins ou tableaux photogeniques que m’ont remis pour vous ceux de nos confreres qui se Sont emparés de vos plus jolies statuettes. je finis cette longue lettre d’arrerages, en vous priant de vouloir bien agreer l’expression de tous mes sentimens
J. B. Biot
Je vous demande mille pardons pour toutes les ratures que j’ai faites, pour donner plus de clarte, a mes expressionsA Monsieur
Monsieur H. F. Talbot, membre de la societe
Royale de Londres &c &c
Lacock Abbey
Chippenham Wilts
England
Translation:
Paris
14 January 1841
Dear Sir,
Yesterday I was very pleased to receive the letter that you did me the honour of writing on the 9th instant, and in which you inform me of the great new advances that you have brought to photography on paper. Next Monday I will eagerly attend to the task you give me vis-à-vis the Academy, where you can rest assured that this announcement will cause quite a stir. You will thus be doing a great service to naturalists and Travellers for whom iodised plates are difficult to manipulate. I also observe that artists find a great inconvenience in images traced on these plates resulting from their unavoidable glare … and they seemed more satisfied, to make everyday use of representations on paper of which they had so fortunately had access to the drawings made by you and also by a mr Bayard who is well-practised.
He has managed to obtain drawings, made by the camera obscura method with which the skilled artists appeared to me to be most delighted. but he keeps his process secret and as he has no notion of chemistry, I am most afraid that he is guided by trial and error alone. Therefore I cannot urge you enough to make your own process known, owing to my age I am a little impatient on this point; but from what you tell me of it this desire is perfectly justified, for other than the artistic aspect that you derive from it, its rapidity will make it infinitely more precious to us for Physics research on the properties of radiations. on this occasion, I am taking the liberty of drawing your attention to a report that I made to the academy only last Monday with Messers Arago and Savary and which will appear in our compte rendu this week, which I presume you receive. It concerns a new and very remarkable fact in relation to the <illegible deletion> effects of different types of radiation. I am not going to enter into the details here as you will find them better presented in the report. however, working on the assumption that you have it before you, here is an experiment, which we have not carried out, and that the extreme sensibility of your paper would perhaps enable you to perform on our behalf. Take a red lens, one of those coloured by protoxide of copper which only allows red and to some extent orange rays to pass. It should be wide enough to completely cover and slightly overlap <illegible deletion> the drawing that you wish to obtain; and it should also be possible to place this drawing at the bottom of a wooden box, for which the red glass will serve as a lid. <illegible deletion> from what you tell me, your paper is placed at the back of your camera obscura, without being exposed to daylight; and no doubt you have also had an opaque shutter in front of the lens which hides it, only to uncover it in <illegible deletion> of the object. With this established and the object in place, open the shutter for only a moment, then close it again immediately, so that the paper only sees the object through the lens for one second at the most, and less still if you can manage this in this way bringing everything back to perfect darkness in which you only see by the light of a candle, which you would even be wise to keep at a slight distance. then having <illegible deletion> the paper where you will probably not see any perceptible imprint, place it at the bottom of the wooden box, which you will cover with the red lens, closing all the joints carefully, and all the lateral slits with several layers of black paper stuck one on top of the other in such a way that radiation cannot cross the paper in any way other than through the red lens. then having covered this with an opaque screen, carry the box, thus sheltered, onto some balcony, or some platform, where you will place it horizontally in such a way that, when the opaque screen is removed, the paper can see through the red glass, not radiant objects but only the sky towards the zenith. The radiation transmitted will leave an impression on Your paper, only on the area of its surface which has received the instant imprint and after several hours, the image previously invisible will become visible without relying on the object’s actual presence; at least presuming that the substance that gives it its sensitivity, be as is probable, <a> bromide, <a> chloride or <an> iodide of silver. for the phenomenon has only been observed up until this point with these three <substances/compounds>. we have not yet even attempted the experiment in the camera obscura, but only by direct impression, which is a lot easier. The extreme sensibility of your paper leads me to believe that this method would work, providing that it was carried out under the conditions specified. for all sensitive substances do not offer these properties of partial exposure. The author of this curious experiment is the son of our colleague mr Becquerel. I am convinced that if you read it in the report it will be of interest to you; and it would be the right <illegible deletion>, that we owed to your new discovery the means to apply it further.
Farewell sir. Accept once again all my thanks. Do not blame my past record on the English or French postal services, but on the tiresome printing of a work on the point of publication, that has worn me out <illegible deletion> I had carried out, nevertheless all your tasks just as you requested for the Academy, as you will have seen in the compte rendus, and I am even your depository for some drawings or photogenic pictures given to me for you by some colleagues who were captivated by your most beautiful statuettes. I end this long letter of arrears, by asking you to kindly accept the expression of all my regards
J. B. Biot
I beg your forgiveness a thousand times over for all the deletions that I have made, to give more clarity, to my expressionsTo Sir
Mr H. F. Talbot, Member of the
Royal Society of London etc. etc.
Lacock Abbey
Chippenham Wilts
England
Notes:
1. Letter not located.
2. Hippolyte Bayard (1801–1887), civil servant and photographic inventor.
3. Dominique François Jean Arago (1786–1853), French physicist, astronomer & man of science.
4. Felix Savary (1797–1841), astronomer & man of science.
5. Alexandre Edmond Becquerel (1820–1891), physicist.