Paris
le 31 Août.
Mon cher Mr Talbot;
C’est à vous que j’aime à m’adresser directement, bien que vous ayez pris Horatia <1> pour votre interprète auprès de moi, c’est à vous que je me plais à dire combien je suis touchée, reconnaissante de la pensée si bonne, si amicale, émanant d’un sentiment d’une bonne vieille amitié qui m’est si précieuse. Croyez donc, Monsieur et ami, que quelque [sic] soient pour moi les résultats de l’offre généreuse que vous avez bien voulu me faire, jamais je n’en perdrai le souvenir. Ces résultats pourraient sans doute être fort avantageux encore; bien que l’on dise que le procédé a déjà été un peu ébruité; mais il s’agit maintenant de savoir si le brévet d’invention que vous avez obtenu du Gouvernement français est antérieur aux divers rapports imprimés par vous en Angletere et présentés à la société Royale de Londres et à l’Institut de Paris; <2> dans le cas contraire le brévet ne serait d’aucune utilité; le possesseur du brévet ne pouvant poursuivre les contrefaçons, le secret étant connu avant l’obtention du privilège. – On m’a parlé diversement de céder ce privilège pour une somme de … ou une rente viagère; on me conseille de me méfier des faiseurs de ces sortes d’affaires; enfin il est bien difficile à une pauvre femme seule de se tirer de toute cette complication de gens avides et fourbes qui n’entrent avec moi en quelqu’accommodement qu’avec l’intention de me duper.
Vendredi 2 Septembre.
Je suis bien aise de ne pas avoir envoyé ma lettre, ayant à ajouter quelques renseignemens qui viennent de m’être fournis par Charles Chevalier, <3> opticien au Palais Royal, (qui m’a dit vous avoir connu, il y a quelques années) sur les avantages à retirer du Calotype en l’exploitant personnellement: voici donc ce qu’il m’a dit à ce sujet: le brévet est insuffisant à assurer l’exploitation exclusive de la propriété par les facilités qu’il y aurait de composer certaines préparations chimiques, répondant à peu près au procédé que vous employez pour le papier; les poursuites devraient donc être si fréquentes, que les frais de justice absorberaient les bénéfices et seraient toujours insuffisantes comme l’effet le procure chaque jour, en ce pays:<4> ainsi donc il ne peut être question, selon Mr Chevalier, de vendre l’invention avec interdiction de la reproduction ailleurs que chez soi; Le moyen de retirer quelques fruits de votre belle invention serait, dit-il, de faire des portraits sur un fond clair, comme celui de la vue de la Serre d’Oxford avec une tour Gothique <5> (parmi les derniers que vous eu [sic] la bonté de m’envoyer.) Il trouve les autres portraits, sur fond brun, un peu indécis; il pense que le public aimerait infiniment mieux ces belles lignes si nettes et si pures avec un fonds blanc, très brillant, comme celui de la vue que l’on trouve enfin la plus parfaite de toutes (la serre d’Oxford avec la tour.) Mr Chevalier pense aussi que si vous aviez la bonté de m’envoyer une courte notice sur les divers moyens dont vous vous êtes servi pour arriver à ces beaux résultats les notices aussi, un peu après, que vous aviez publiées sur les diverses phases de votre invention; et enfin le nom des légendes employés à la préparation du papier; il est bien entendu que cette dernière circonstance ne devrait être confiée à mon associé ou collaborateur, qu’après [illegible deletion] avoir fait des arrangements définitifs avec lui: il me faut encore votre autorisation, de vous à moi par lettre seulement, cela s’entend, pour que je puisse en toute sécurité faire vendre les fioles du liquide dans le cas où cet engagement présenterait quelqu’avantage; quant à la notice, vous m’avez déjà donné la permission de la publier. C’est sur le portrait, je le répète, que se fonde l’espoir de supersede le Daguerreotype: <6> il y a unanimité d’opinions à cet égard.
Mr Charles Chevalier, m’a priée de vous recommander ses nouvelles chambres noires qui dit-il, sont une amélioration notable en ce qu’elles produisent des résultats infiniment plus rapides que celles de Lerebours <7> employées pour le Daguerreotype. Je lui ai dit que vous obteniez vos vues et même les portraits en quelques secondes: ne me suis-je pas trompée? – c’est encore ce dernier point qui stimule le desir qu’il aurait q de s’essayer dans cette partie, comme offrant une supériorité bien grande sur la méthode de Mr Bayard <8> qui est beaucoup plus lente: il faut quatre ou cinq minutes mais il a dit-il, beaucoup de netteté.
Je vous réitère mes sincères remerciements pour les dernières vues envoyées par le moyen de Dr Lepsius; <9> elles offrent une amélioration marquée sur les précédentes surtout deux d’Oxford, y compris celle déjà mentionnée et si fort admirée de tout le monde. – Milles excuses encore pour abuser ainsi de vos précieux loisirs; mais votre bonté m’encourage et me fait présumer encore que vous serez assez bon pour ne pas trop différer une réponse que j’attends avec une vive anxiété.
Croyez moi, mon cher Monsieur Talbot, votre bien affectionnée et toute dévouée
Amélina Petit
C’est avec un vif regret que j’apprends d’Horatia , la triste situation de Mme Talbot <10> auprès de sa sœur dont l’état paraît si précaire.
Voulez-vous bien vous charger de dire à Horatia, avec mes amitiés, que j’ai reçu ses deux lettres auquelles je vais répondre ces jours-ci.
Milles complimens et amitiés à Milady. <11> –
J’oubliais encore de vous dire que Mr Chevalier pense que si vous faisiez ou aviez fait quelque nouvelle découverte dans la méthode à employer pour perfectionner le Calotype, et que vous voulussiez l’envoyer cacheté et demander que le paquet de fût pas ouvert avant votre autorisation à l’Académie des Sciences, à Paris comme cela se fait souvent, on pourrait l’exploiter ici avec grand avantage pour votre renommée et pour mon bénéfice, demeurant secret jusqu’à ce qu’il vous plût de la publier; c’est alors qu l’on n’a pas à craindre la concurrence; bien entendu que nous serions seuls pendant quelques temps dépositaires du secret. – J’ai cru devoir vous répéter tout ce qu’il m’a communiqué à ce sujet. Il m’a paru du reste un honnête homme assez positif, peu enthousiaste et desirant tirer honorablement parti de l’invention dans l’intérêt de l’art autant que dans le sien. Le tout, court et précis: une espèce d’historique de l’invention; il le ferait traduire ici, et la publierait à ses frais en partageant les bénéfices avec moi: – Si vous m’autorisiez à mettre votre cachet sur les bouteilles que du liquide préparatoire au papier sensitif, il ne doute pas qu’il ne s’en vendît bon nombre parceque l’on pourrait l’annoncer comme le seul et véritable liquide de Mr Talbot et dont la vente et autorisée par lui dans l’usage photographique. Mr Chevalier m’a dit de plus qu’il serait important de ne pas perdre de temps, parcequ’un Mr Bayard, dout vous avez sans doute entendu parlé, qui au moyen d’un procédé assez semblable au vôtre et qu’il a nommé Daguerreotype sur papier, produit de fort bonnes vues, dit-il, et des portraits, se proposant de tirer parti de ce perfectionnement dès qu’il serait arrivé au point où il le desirait; il s’agirait donc de le prévenir au plutôt.
J’ai déjà parlé de la facilité que vous m’offriez d’en tirer parti, à plusieurs personnes en lesquelles j’ai grande confiance – à Mr Comte <12> entre autres qui me conseille la vente du procédé; mais vous voyez que Mr Chevalier, homme d’industrie et fort honorable qui m’est recommandé par un de mes cousins, m’a a peu près démontré l’impossibilité d’employer ce moyen. Quelques artistes et chimistes ne doutent nullement qu’il n’y ait quelquechose à faire by way of exploitation, et peut-être beaucoup à faire si l’on savait comment s’y prendre et qu’on se hâtat; surtout en considérant cette branche si importante d’un art, comme susceptible de très-grands improvements et développements; mais il faut être habile, éclairé et pour moi, bien conseillée par les soins d’un honnête homme, chose si rare dans notre temps dans mon cher pays!
Après vous avoir ennuyé longuement de toutes ces réfléxions, il me reste une dernière faveur à vous demander, mon cher Monsieur Talbot, qui serait de m’envoyer dans une lettre, ou autrement, (adressée à Mr Comte pour moi) deux ou trois portraits, bien réussis, sur le fond blanc et clair
Nous avons quelque difficulté à nous procurer le compte rendu <13> de l’Institut dont vous m’avez parlé; ce dont je n’en suis pas trop fâchée en ce que cela prouve que le procédé n’a pas encore été mis à la portée de tout le monde; ce que j’espère bien faire, moi.
Translation:
Paris
31st August
My dear Mr Talbot;
It is directly to you that I like to address myself, even though you have chosen Horatia to act as your interpreter with me, it is to you that I like to say how much I am touched and grateful for such a good friendly thought, stemming from our good long friendship that means so much to me. I assure you therefore, Sir and friend, that whatever the outcomes for me of your kind and generous offer, never shall I forget the memory of it. These outcomes could without doubt be even more advantageous; even though it is said that the method has already been divulged somewhat; but for now the questions is whether the patent that you obtained from the French government came before the various reports published by you in England and presented to the Royal society of London and to the Institute in Paris; if this is not the case the patent would be of no use; as the owner of the patent would be unable to bring proceedings against counterfeiters, the secret being known before the rights obtained. I have been approached by various people who want me to yield the rights for a sum of … or a life’s annuity; I have been advised to be wary of those plotting such affairs; in a word, it is difficult for a poor lone woman to disentangle herself from all these greedy and wily people who enter into arrangements with me with the sole intention of duping me.
Friday 2nd September
It is a relief to me that I did not send my letter, as Charles Chevalier, the optician at the Palais Royal, (who tells me he met you several years ago) has just provided me with some information about the advantages that can be had from the Calotype by exploiting it personally: here, therefore, is what he told me about it: the patent is not enough to guarantee the exclusive use of the property because of the ease with which some chemical preparations could be made, corresponding more or less to the method that you use for the paper; legal proceedings would therefore be so frequent, that the lawyers’ fees would swallow up any profit and would always be insufficient as is attested every day in this country: it would therefore be out of the question, according to Mr Chevalier, to sell your invention forbidding reproduction except in one’s own land; The means of enjoying the fruits of your beautiful invention, he says, is to take portraits on a light background, like the view of the Conservatory of Oxford with a Gothic tower (it is amongst the latest ones that you had the kindness to send me). He finds the other portraits, on a brown background, a little blurred: he thinks that the public would infinitely prefer these beautiful lines, so clear and so distinct, with a light, very bright background, just like the view that is, in a word, the most perfect of them all (Conservatory of Oxford with a Gothic tower.) Mr Chevalier also thinks that if you would be so good as to send me a short set of instructions on the various means that you used to produce such exquisite results, and also, a little later, the sets of instructions that you have published on the various phases of your invention; and finally the explanations for the terms employed in the preparation of the paper; it is of course understood that this final piece of information should only be given to my associate or collaborator, after having made definitive arrangements with him: I must await your permission, from you to me by letter alone, of course, so that I can proceed in complete confidence and sell the phials of liquid should this agreement be of some advantage; as for the set of instructions, you have already granted me permission to publish it. I repeat that it is upon the portrait the hope to supersede the Daguerreotype is founded; opinion is unanimous on this issue.
Mr Charles Chevalier begged me to recommend to you his new camerae obscurae which are, he tells me, a marked improvement in that they produce results infinitely more quickly than those of Lerebours that are used for the Daguerreotype. I have told him that you obtained your views and even the portraits in just a few seconds: I am not mistaken? – and it is this last point that encourages his desire to try his hand in this domain, as affording great superiority over the method employed by Mr Bayard which is much slower: it takes four or five minutes but, he tells me, has much clarity.
I reiterate to you my sincere gratitude for the last views sent through Dr Lespsius; they offer a marked improvement on the preceeding ones, especially two of Oxford, including the one already mentioned which is so admired by everyone. – My profuse apologies for encroaching on your precious spare time in this way; but your kindness encourages me and prompts me to presume that you will be kindly enough not to postpone writing to me a response that I await with intense anticipation.
Believe me, dear Mr Talbot, your most affectionate and devoted
Amelina Petit
It is with deep regret that I learn from Horatia, of Mrs Talbot’s sad situation with her sister whose condition seems so fragile.
Could you please be sure to say to Horatia, with my best wishes, that I have received her two letters to which I will respond in the course of the next few days.
My most sincere regards and best wishes to Milady. –
I forgot to say to you that Mr Chevalier thinks that if you were to make or had made some new discovery regarding the method to perfect the Calotype, and if you were to send it sealed and ask for the parcel not to opened to the Académie des Sciences, in Paris, asking that the package should not be opened before your authorisation had been granted, as is often done, we would be able to make the most of it here for your good name and to my advantage, remaining secret until you desired to make it public; in this way we need not fear any competition; obviously, for some time, we alone would have the secret. – I felt I ought to repreat for you everything that he told me. Moreover, he struck me as a fairly positive, honest person with little enthusiasm who is but anxious to take honest advantage of the invention, in the interests of art as well as his own. Everything short and precise: a sort of history of the invention: he would have it translated here, and publish it at his own expense, sharing the profits with me: – If you would give me the permission to put your seal on the bottles of the preparatory liquid for the sensitive paper, he has no doubt that he would sell a substantial number as we could advertise it as Mr Talbot’s one and only genuine liquid, the sale of which is permitted by him for photographic purposes. Mr Chevalier told me in addition that it would be important not to lose any time, because a certain Mr Bayard, of whom you have no doubt heard, using a procedure that is similar to yours and that he has named Daguerreotype on paper, produces very good views, he says, and portraits, and is proposing to take advantage of this improvement as soon as he has reached the stage he was hoping for; it is therefore necessary to forestall him as soon as possible.
I have already spoken of the opportunity of taking advantage of this which you offered me to several people in whom I place complete trust – Mr Comte among others who advises me on how to sell the process; but you see that Mr Chevalier, a man who works in industry and is extremely honorable, who has been recommended to me by one of my cousins, has more or less demonstrated to me the impossibility of using this method. Some artists and chemists do not doubt that there is something to be done by way of exploitation and perhaps a lot to be done if one only knew how to go about it and quickly; especially taking into account such an important branch of one of the arts, as being open to very great improvements and developments: but one must be skillful, enlightened and for myself, well advised by the care of an honest man, which is such a rare thing in my dear country!
After troubling you at length with all these reflections, I have one last favour to ask of you, my dear Mr Talbot, which would be to send me in a letter, or otherwise, (addressed to Mr Comte for me) two or three small successful portraits on white and light backgrounds.
We have been having some difficulty in obtaining the compte rendu of the Institute that you spoke of; a fact which has not greatly irritated me as it proves that the process is not yet accessible to all; something which I hope to do myself.
Notes:
1. Henrietta Horatia Maria Gaisford, née Feilding (1810–1851), WHFT’s half-sister.
2. Many of the most important papers, and some letters, were presented through these two eminent and powerful scientific societies, the Royal Society of London, and the Academie Royale des Sciences, Paris. Throughout her correspondence, Amélina refers to the latter as the ‘Institute’.
3. Charles Chevalier (1804–1859), optician, Paris.
4. This was sound advice, for the patent laws of both Britain and France each had a complex structure with arcane provisions and little similarity between them.
5. This view of the Botanic Garden, Oxford, from 30 July 1842. It is possible that WHFT sent the same image to Prof Charles Giles Bridle Daubeny (1795–1867), MD & chemist [see Doc. No: 04672]. See Larry J. Schaaf, Sun Pictures Three: The Harold White Collection of Works by William Henry Fox Talbot (New York: Hans P. Kraus), p. 44. Schaaf 2676.
6. It was evident to many artists, scientists and capitalists that commercial portraiture would be a powerful and lucrative use of photography, and many advancements were made to take advantage of this. The vast majority of early commercial Daguerreotypes were portraits.
7. Noel Paymal Lerebours (1807–1873), optician, of Lerebours & Secretan, Paris.
8. Hippolyte Bayard (1881–1887), photographic inventor.
9. Dr Karl Richard Lepsius (1810–1884), German Egyptologist.
10. Constance Talbot, née Mundy (1811–1880), WHFT’s wife.
11. Lady Elisabeth Theresa Feilding, née Fox Strangways, first m Talbot (1773–1846), WHFT’s mother.
12. Mr Comte, Director General of the Post Office in Paris, had agreed to receive the photographs posted there by WHFT. [See Doc. No: 04539].
13. Comptes Rendus hebdomadaires des séances de l’ de l’Académie des Sciences.